Christian ELONGUE

La date de soutenance de mon 3ème master est-elle une synchronicité ?

Notre vie est parsemée de signes qui nous poussent à prendre des décisions irrationnelles ou à croire en notre destin. Mais ces signes sont-ils simplement des concours de circonstances, une projection du subconscient dans notre réalité ou tout simplement la manifestation de la volonté de Dieu ?

La synchronicité là même c’est quoi ?

Vous demandez à des personnes au hasard dans la rue si elles connaissent les coïncidences, elles vous répondront par l’affirmative. En revanche, si vous les interrogez sur la synchronicité, pas une sur cent saura de quoi il s’agit. « Synchronicité » est un terme inventé par le psychologue suisse Carl-Gustav Jung. Il fut influencé par le biologiste Paul Kammerer qui considérait que les phénomènes de coïncidences isolées ou en série sont la manifestation d’un principe universel de la nature, et opérant indépendamment de la causalité physique.

Le rêve guide la nuit, la synchronicité le jour…

La synchronicité se déploie ainsi dans la réalité sous forme de coïncidences « significatives », qui sont parfois ironiques et parfois même très utiles. Par exemple, le fait de croiser une personne à qui vous étiez justement en train de penser, tomber par hasard sur un produit qui résout un problème que vous aviez, sans pour autant l’avoir cherché ; tomber sur une personne qui vous aide à relever le défi auquel vous êtes confronté actuellement, comme si elle avait été directement mise sur votre route pour vous aider ou recevoir un message rassurant de façon inattendue, au bon moment. Pour certains, ce phénomène est un « clin d’oeil » de l’univers, un signe de votre intuition.

Avez-vous déjà été confronté à la synchronicité ?

Cela signifie que vous étiez au bon endroit, au bon moment. Ce phénomène « magique » nous permet de savoir que nous sommes sur la bonne voie et ouverts à l’orientation spirituelle. Depuis la nuit des temps, les hommes ont constaté certaines coïncidences dans leurs vies, sans pour autant pouvoir expliquer pourquoi ces événements se manifestaient. Tel fut peut être le cas pour la soutenance de mon 3ème master en Ingénierie Pédagogique Multimédia – Recherche en Formation des Adultes (IPM-RFA) de l’Université Science et Technologie de Lille 1, qui fut planifiée pour le Mercredi 11 Avril 2018 à 12h.

1ère Page de Couverture de mon mémoire de Lille. Credit: Christian Elongué__synchronicité
            1ère Page de Couverture de mon mémoire de Lille, soutenu le 11 Avril 2018.

Si cette date peut vous paraitre anodine, elle ne l’est point pour moi. En effet, cette date tombait exactement à 1 an jour pour jour après la soutenance de mon second Master en Management des Industries Culturelles à l’Université Senghor d’Alexandrie en Egypte. Master soutenu le 11 Avril 2017 à 11h et au terme duquel j’étais sorti Major de Promotion et couronné par le Prix d’Excellence de la Fédération Wallonnie-Bruxelle en Belgique.

1ère Page de Couverture de mon mémoire de Senghor. Credit: Christian Elongué_synchronicité
1ère Page de Couverture de mon mémoire de l’université Senghor, soutenu le 11 Avril 2017.

Depuis que je m’étais rendu compte que ma soutenance d’IPM-RFA était survenu le même jour et mois que celle de Senghor, je n’ai cessé de me questionner :

Est-ce le fruit du hasard, de la providence, de la chance ou tout simplement un coup du destin ? M’étais-je inscrit à ce Master parce que je le voulais ou étais-je prédestiné à le faire ? Quel lien existe-t-il entre ce dernier et celui de Senghor ? Si c’est la volonté de Dieu, que voudrait-il me faire comprendre ? Quel rôle ces formations joueront elles sur ma destinée, sur celle de l’Afrique et du monde ? Sommes nous vraiment maitre de notre destinée?

Ces petites questions et bien d’autres font parties des questions existentielles. Celles-là que l’Homme se pose pour comprendre la vie et donner un sens à sa vie. Au terme de trois semaines de méditations, les réponses que j’obtenais était toujours parcellaires. Chaque réponse générant une nouvelle question. Ce n’est qu’au Culte du Dimanche, qu’un sermon de notre Pasteur Rev. Richard Whitcomb me rasséréna.

 

La synchronicité c’est lorsque Dieu décide d’écrire droit avec des lignes tordues.

Il avait expliqué en ce jour que la chance n’existe point dans le dictionnaire d’un véritable chrétien. Le hasard n’est que la manifestation de l’intelligence de Dieu. Ce n’est pas parce que c’est inexplicable par l’homme qu’il doit conclure au hasard et à la chance. Par exemple, Jonas avait refusé d’obéir à ce que Dieu lui demandait, et alors il était parti aux antipodes ; mais voilà, en bateau, c’est la tempête ! Quel hasard… Mais les marins ne croient pas trop au hasard et ils tirent au sort pour savoir qui est responsable de ce déchainement. Et c’est Jonas qui est désigné. Quel hasard ! Ainsi que plus tard quand un gros poisson passe par là et avale Jonas. Le hasard était manipulé par Dieu… Même Einstein, a-t-il cité, ne croyait pas au hasard. Il avait d’ailleurs lancé son célèbre « Dieu ne joue pas aux dés! »  

Après avoir écouté ce sermon, je n’avais peut-être pas immédiatement trouvé toutes les réponses à mes questionnements mais je suis davantage plus confiant. J’ai eu à vivre des expériences qui m’ont prouvé que Dieu dirigeait les évènements et mes choix ; pour mon bien.  Bien que je ne puisse deviner tous les contours de ma destinée et de ses plans dans ma vie, je me laisserai guider par sa Voix. Ce qu’il me dira de faire, je le ferai diligemment.

J’ai finalement arrêté de me questionner pour m’abandonner à sa Volonté.

J’ai arrêté de me questionner et décidé de m’abandonner à sa Bonne Volonté, qui est toujours la meilleure. J’ai arrêté de me questionner pour Lui faire confiance et prendre quelques jours afin de savourer les fruits de ce long et dur labeur. Oui ! Ce Master fut l’une de mes meilleures expériences académiques, surtout parce que c’était dans un champ totalement différent de ma formation initiale en Lettres et Linguistique. Par ce 3ème Master, j’avais voulu braconner aux frontières d’autres disciplines, poussé par mon instinct d’aventurier d’Orunmila (Dieu Yoruba de la Sagesse).

Je me souviens encore de toutes ces soirées d’insomnies passées à apprendre la programmation informatique. Il arrivait des fois où j’avais envie de frapper mon laptop, surtout lorsque le code que j’avais passé des heures à rédiger ne produisait pas le résultat escompté. Heureusement que je pouvais compter sur mon frère Ghanéen Johnson Lorlornyo ou sur mon ami Dr. Mohamed El Hadi Bene

Ce Master achevé, je ne puis que remercier ma famille, amis et toutes les personnes-là qui m’ont accompagné et soutenu. Cette formation, j’en suis désormais convaincu, n’est point le fruit du hasard, mais rentre dans les Plans de Dieu pour ma vie. Des milliards de MERCI seraient insuffisants pour L’exprimer ma reconnaissance car c’est en lui que j’ai puisé l’Inspiration, la Force et l’Intelligence pour réaliser ce travail.

Croire que le hasard ou la synchronicité n’existent point n’est évidemment qu’une considération personnelle. Avez-vous vécu de pareilles situations ? Faites-moi part de vos idées sur ces sujets, parfois controversés.


La grande finale du concours d’art oratoire au féminin de Charly Tchatch

La finale du concours d’art oratoire au féminin organisée  par la startup Charly Tchatch  a eu lieu le mercredi 2 mai 2018 dans l’un des grands hôtels de Libreville. Nous retraçons ici les grandes lignes qui ont marqué cet évènement.

Un auditoire massif présent à cete finale tant attendue. Credit: Charly Tchatch
       Un auditoire massif présent à cete finale tant attendue. Credit photo: Charly Tchatch

Tout a commencé par le tirage au sort des sujets de débat et la définition de l’ordre de passage des candidates. Pour cette grande finale les candidates devaient débattre sur deux sujets au choix à savoir:

1- La femme qui réussit est celle qui construit des fondations solides à partir des pierres qu’on lui a lancées.
2- Le prix de l’inaction est bien plus grand que le coût d’une erreur.

Ponctué par des prestations de nombreux artistes invités pour l’occasion, le concours s’est tenu devant plus de 500 spectateurs qui ont d’abord assisté aux prestigieux exposés des 12 concurrentes.

À la fin de ce premier passage , juste 6 de ces femmes audacieuses ont été qualifiées pour la grande finale. Il s’agissait donc de :

DJAMILA ASSENGONE ANGOUE
-MAROSSIA AVOMO MBA
-ANDREE BRELLE DANIELLE MOUNGOLA BANZOUZI
-JULIE OKE
-MALAURIE OVINA ZUE
-NANA GRACE MONICA REMBOUNDOU

A la suite, s’est tenue la compétition des deux lycéennes. Il s’agissait de :

Sarah SHINDJE, du Lycée Tchorere, qui a affronté Emmanuelle FOUTOU, du Lycée Quaben. Cette dernière sortira victorieuse dans cette catégorie. Pour finir avec le challenge des six grandes finalistes, à ce deuxième passage, les compétitrices  avaient le choix de parler d’un sujet de leur choix sachant que tout se jouerait sur la thématique choisie.

Les trois lauréates du concours. Credit Photo: Charly Tchatch

De ce dernier challenge la 3ème place a été occupée par Julie Oke, le 2ème rang quant à lui a été arraché par Malaurie Ovina Zue et Andrée Brelle Danielle Moungola Banzouzi sort victorieuse de cette première édition du concours d’art oratoire au féminin organisé par Charly Tchatch et son équipe.

Il faut surtout noté que toutes les 3 ont un niveau licence.

Le public venu nombreux a témoigné par des interviews avoir passé des moments inoubliables, exceptionnels et particuliers… mais surtout avoue avoir été bluffé par le talent de chacune de ces jeunes femmes audacieuses.

Il est à rappeler que le jury était composé de six membres qui sont:

  • FRANÇOISE NDAYISHIMIYE :  représentante de l’ONU SIDA au Gabon et présidente du Jury.
  • STEEVE ANDERS ON BANDZAMBI :  animateur et présentateur TV
  • BENEDITH KESSANY: coache en motivation, ambassadrice protest ONU SIDA
  • CAMELIA N :  Membre du conseil d’administration alumni du celsa Paris Sorbonne
  • JOPHRA MFOUBOULA :  Président de l’ONG Educaf
  • CONFIDENCE VONO : magistrat et professeur en droit.

Cette grande finale  sera diffusée sur label TV, l’un des fidèles partenaires de la startup Charly Tchatch, tout comme Ossprod, l’appel des mille et une, le Grand Mbandja, Tomorrow, radio ubuntu , BK consulting.

                           Interview de la meilleure oratrice. Credit Photo: Charly Tchatch

Cette première édition  au Gabon, qui valorise la jeune femme Gabonaise aujourd’hui critiquée, a pris fin aux alentours de 21h par la remise des trophées et des prix aux lauréats par les autorités présentes dans la salle à l’instar du PDG de label TV qui a d’ailleurs promis aux 12 finalistes des stages rémunérés au sein de sa structure.

A titre de rappel, les prix étaient les suivants:

– 500 000 FCFA pour le vainqueur
– 200 000 FCFA pour la 2ème
– 100 000 FCFA pour la 3eme, et
– 300 000 FCFA pour les deux lycéennes qui devraient percevoir chacune 150 000f.

La prochaine édition est déjà en cours de préparation et sera encore plus éblouissante.

Cyrlie


Comment surmonter les entraves à l’industrialisation de la culture africaine ?

La culture est le moteur sinon le cœur de tout développement économique. L’industrie culturelle et créative est le secteur de l’économie mondiale qui connaît la croissance la plus rapide, estimée à 7 % par an. Malgré son puissant role symbolique dans la construction des imaginaires, en Afrique, la Culture demeure une simple pature dans la Nature. La filière des industries culturelles, est encore immature et ce billet en présente les causes mais aussi quelques solutions. 

 

D’emblée et pour limiter toute asymétrie d’information dans notre analyse, il nous parait important d’indiquer quelques considérations préliminaires. Il est généralement admis qu’il y a industrie culturelle lorsque « les biens et services culturels sont produits, reproduits, stockés ou diffusés selon des critères industriels et commerciaux :  c’est-à-dire une  production  en  grande  série  et  une stratégie  de  type  économique  prioritaire  sur  toute  visée  de  développement culturel » (Unesco, 1982). Cependant, signalons que c’est la présence du capital, de la mécanisation et de la division du travail, et non les intentions des auteurs, qui détermine le caractère industriel ou non d’une production. Ainsi, l’industrialisation de la culture africaine, dont nous traitons, renvoie essentiellement à deux formes de distribution : la reproduction sur copie individualisée et  la  diffusion,  sur  des réseaux appropriés, d’une seule copie captée par des milliers de récepteurs.

Le discours contemporain sur les industries culturelles est bien optimiste. Alors que certains n’y voient qu’un magma déstructuré et diffus au sein duquel il semble difficile de se repérer, d’autres y perçoivent le gisement d’un énorme potentiel économique qui demeure largement sous-exploité. Ce dernier cas nous renvoie à la situation de la culture en Afrique, qui n’est point au cœur du développement mais au cœur du fleuve Léthé[1]. Le moteur de la culture en Afrique subsaharienne est en panne et dysfonctionne. Et nécessite par conséquent des « réparations » pour assumer pleinement son rôle de catalyseur de l’économie régionale. Tous s’accordent sur la nécessité voire l’urgence de mieux structurer et règlementer le secteur des arts et de la culture afin qu’on puisse véritablement parler d’industrialisation de la culture africaine.

Le principal dénominateur commun à la plupart des pays ACP[2], c’est la faiblesse des politiques pour l’économie de la culture. Il y a entre autres problèmes :

  • Le faible accompagnement et soutien aux entreprises culturelles

C’est ce que soulignait Moelle Kombi, ministre camerounais des Arts et de la Culture : « Ces structures sont confrontées à des problèmes juridiques, de structuration organique et fonctionnelle et de financement ».

  • L’insuffisance de cadres et experts formés aux métiers des industries culturelles et créatives

En effet, le manque de formation des entrepreneurs culturels et la  nature souvent  informelle  des  méthodes  de  gestion  constituent  des  contraintes  techniques  et culturelles qui empêchent l’élaboration avec une capacité suffisante de stratégies à moyen et long  terme  pour  intégrer  les  logiques  du  marché  local,  sous-régional  et  international. Telle est la tâche à laquelle l’Organisation Internationale de la Francophonie s’attèle aujourd’hui à travers son opérateur direct au service du développement africain : l’Université Senghor d’Alexandrie. On y forme des cadres en matière d’entreprenariat culturel dans son Département de la culture qui contient des filières tels que Gestion du patrimoine culturel (GPC), Communication et Média[3] (CM) et gestion des Industries culturelles (GIC) pour résorber ce déficit de cadres en Afrique. Au-delà de cette formation de professionnels du secteur culturel, il est aussi important, pour saisir les opportunités numériques et le contexte de la mondialisation, de disposer d’un meilleur accès au financement afin de moderniser leurs équipements, de concevoir de nouvelles méthodes de production et de distribution et d’adapter leurs modèles commerciaux.

  • Le faible accompagnement des collectivités locales

En effet, avec l’inefficacité des politiques de décentralisation, les collectivités locales que sont les régions, les communes et les communautés rurales n’ont pas suffisamment de fonds pour la promotion des arts et de la culture. On note également des besoins en matière d’infrastructures et de ressources humaines qui défavorisent le renforcement des entreprises culturelles locales privées. Or la culture fait partie de l’attractivité d’une ville au même titre que son dynamisme économique. Il est donc important que les collectivités locales développent leur stratégie de marketing territorial de la culture et établissent des partenariats publics-privés avec les acteurs culturels. Les dimensions culturelles du développement des territoires se manifestent en chacun de nous à travers différents points de nos coutumes et nos traditions.

L’industrialisation de la culture africaine n’est possible que s’il existe un marché suffisamment grand pour y écouler les biens et services culturels produits.  Avec le numérique, la diffusion et la distribution des biens informationnels et culturels s’en trouve grandement facilitée. Mais en Afrique, on note une faible circulation des produits culturels. Pour le cas de la littérature, il est plus facile de trouver un ouvrage camerounais à Paris qu’au Tchad, Gabon… Les récents accords de libre circulation intra-africaine, lorsqu’ils seront réellement effectifs et mis en œuvre, pourront significativement contribuer au renforcement du commerce des biens et services culturels. Car les industries culturelles constituent un secteur incontournable de la cohésion sociale, de la paix et du développement économique des Etats de chaque sous-région d’Afrique.

Commercialisation de l'art africain @Flickr
Commercialisation de l’art africain Penn Museum@Flickr

Au-delà de ces mesures, nous pensons qu’il serait également important de :

  • Mener une réflexion concertée, multipartite et profonde des mécanismes de financement des projets de l’économie culturelle dans chaque pays en fonction des réalités locales

Aucun modèle d’industrie culturelle ne doit être importé ou imposé à l’Afrique. Chaque pays doit définir et développer les secteurs prioritaires de sa politique culturelle en fonction de l’environnement local. Le plus important est qu’il y ait une coordination entre le gouvernement, le secteur privé et la société civile. Les pouvoirs publics, dans ce cadre, interviennent à trois niveaux indissociables : faciliter l’accès aux consommateursstimuler la créativité des acteurs et l’émergence de marchés viables.

  • Promouvoir les opportunités d’investissements dans le secteur de la culture et du tourisme

Pour y parvenir de manière effective, il faut que la culture soit réellement considérée comme une activité économique à part entière et qu’elle soit soumise aux règles concurrentielles du marché comme les autres secteurs de l’économie. Le champ de la culture et des communications n’échappe plus aux règles fondamentales de l’économie capitaliste (Tremblay, 2008). « Il est inconcevable qu’au moment où on parle de plus en plus d’économie de la culture les porteurs de projets ne soient pas traités comme tout le monde et continuent de bénéficier de subventions à fonds perdus sans pour autant être obligés d’être contrôlés au vu des résultats de leurs projets », complète Espera Donouvossi, chargé de projet au sein du réseau d’entrepreneurs culturels MOKOLO.

  • Encourager la recherche technologique, stimuler l’innovation et établir un propice climat des affaires dans le secteur culturel et touristique,
  • Promouvoir le partenariat public –privé, le marketing territorial de la culture, le développement de l’économie de la fonction publique territoriale par la culture et le secteur productif de sa main d’œuvre.

En définitive, le passage au numérique est plus qu’une opportunité mais une nécessité pour surmonter les challenges susévoqués. Le numérique a un énorme impact sur la manière dont les biens et services culturels sont produits, diffusés et consommés. Ces changements offrent des possibilités aux secteurs de la culture. Grâce au numérique, les efforts pour l’industrialisation de la culture africaine peuvent être propulsés, à condition de le faire à bon escient. La baisse des coûts de distribution, l’apparition de nouveaux canaux de distribution et l’émergence de possibilités pour des produits culturels peuvent faciliter l’accès aux œuvres et améliorer leur circulation en Afrique et dans le monde entier.

 

 

[1] Dans la mythologie grecque, Léthé, fille d’Éris (la Discorde), est la personnification de l’Oubli.

[2] Afrique Caraïbe Pacifique

[3] Par exemple, on y forme au métier de journaliste culturel. Une fonction assez négligée de par ses faibles enjeux économiques pour les praticiens.


Pourquoi devons-nous soutenir les entreprises culturelles au Cameroun?

De la nécessité de promouvoir les entreprises des industries de la culture au Cameroun.  

Les entreprises culturelles désignent cet « ensemble hétérogène dont la diversité s’explique tant par l’appartenance à des secteurs artistiques distincts (lecture publique, spectacle vivant, conservation et animation du patrimoine, arts plastiques, audiovisuel, édition littéraire et phonographique…) que par l’histoire des structures considérées, et plus particulièrement l’origine – publique ou privée – de leur création »[1].  En tant que filière de l’industrie culturelle, elles sont des unités de production et de commercialisation de biens portant la marque symbolique, esthétique et identificatrice d’une culture et ayant une valeur marchande. Moteurs des échanges de biens et de services culturels, ainsi que de capitaux, les entreprises culturelles contribuent au développement de l’économie nationale.

En prenant part active à la croissance économique intérieure d’une nation, elles apportent une valeur ajoutée dans la valorisation des richesses, dans la création d’emplois et le développement humain. Le rôle qu’elles jouent dans l’appropriation et la valorisation des richesses est capital : il détermine l’intérêt économique donné à la créativité artistique et culturelle. Avec la mondialisation galopante [2]et les développements sociaux, culturels et technologiques qu’elle entraîne, on assiste à une intensification de notre consommation de produits culturels : l’œuvre artistique est devenue commerciale, et sa diffusion obéit à des logiques inspirées du secteur privé. De nombreuses transformations sont à l’œuvre au sein des industries de la culture[3], favorisant ainsi des échanges de biens, de services et de capitaux.

Cependant, alors que ce secteur est au cœur de la dynamique de développement dans bien d’autres pays, au Cameroun, la filière demeure négligée, non structurée et (presque) à la périphérie des politiques publiques. L’aspect économique du secteur culturel n’y a pas été pris en compte à sa juste valeur. Pour certains, le rôle de la culture consiste seulement à « éclairer » le public ou à le divertir. Son apport économique n’est pas considéré comme un élément important. D’où le déficit de données concernant l’activité et les performances des industries culturelles. Or il est important que le secteur se dote de statistiques claires, visant à prouver au politique sa contribution au développement national. Malgré la reconnaissance de son utilité, les données quantifiables sur l’impact des industries culturelles africaines sont rares, voire inexistante dans certaines filières comme l’artisanat. Il s’agit pourtant d’un « secteur dont les retombées sont palpables et impactent directement les populations », nous rappelle Nadia Nkwaya, chargée de recherche à Arterial Network.

D’après Vounda Etoa, directeur des Editions Clé, « la plupart des entreprises culturelles qui existent au Cameroun fonctionnent sur une base familiale alors que l’on devrait passer à une gestion standardisée. Il faut une administration rigoureuse avec une gestion toute aussi pointue. » En effet, le marché des biens et services culturels est loin d’être structuré sur le territoire camerounais. Des initiatives individuelles émergent çà et là, mais l’industrialisation de la filière des arts et de la culture n’est pas encore effective.

Les activités et projets culturels développés sont sporadiques et n’ont pas toujours d’émanation sociale pour asseoir leur renommée. Or pour dynamiser cette filière, il faut que des activités soient organisées en continu tout au long de l’année. Ce n’est qu’après huit ans que fut organisé, en avril 2016, la 2ème assise sur les entreprises culturelles et industries créatives au Cameroun afin de préparer l’élaboration et la mise en place d’une politique incitative pour mieux structurer le secteur – la première avait eu lieu en 2008. Pour y parvenir, nous proposons deux pistes : l’une éducationnelle et l’autre structurelle.

 Le premier enjeu est lié à l’éducation artistique et culturelle.

Il s’agit d’enseigner la culture camerounaise et africaines aux enfants dès le bas âge, afin qu’ils puissent acquérir ou développer des connaissances artistiques ou culturelles. En effet, le marché des arts et de la culture ne sera jamais durable si la population, principale clientèle des biens et services culturels, n’est pas à même de disposer des codes esthétiques minimum pour reconnaître et apprécier la valeur des productions artistiques et culturelles. Cependant, éduquer ne suffit point, il faut également réglementer et encadrer la filière. Cela permettra de veiller à ce que la logique commerciale ne prenne pas le dessus sur la logique culturelle au risque de la banaliser, d’appauvrir le contenu  des produits culturels et même d’influencer le goût des consommateurs à des fins de contrôles économiques ou idéologiques.

Car cela ôterait à l’usager tout sens de critique constructive pour ne faire de lui qu’un consommateur « avide de nouveautés ». Dans ce cas, il pourrait donner la préférence à la médiocrité agréable plutôt qu’au plan réellement créateur. C’est ce qu’on observe lorsqu’on voit la majorité de la population s’extasier devant des productions culturels de faible qualité[4]. Sans éducation artistico-culturelle, il sera très difficile pour un jeune de décrypter et de savourer à sa juste valeur des artistes « talentueux » comme Charlotte Dipanda, Richard Bona, Manu Dibango ou Blick Bassy… Quand notre champ de connaissance musical, théâtral, cinématographique… est pauvre, il est très difficile de savoir et de pouvoir reconnaître des biens culturels de qualité.

Ce rôle d’éducation artistique et culturelle incombe premièrement au ministère de la culture et des Arts. Il se doit d’élaborer et de veiller à l’implémentation effective de politiques culturelles décentralisées au niveau de chaque communauté, en passant évidemment par le système éducatif. Par exemple, des activités culturelles doivent être organisées au sein des établissements scolaires, des partenariats de coopération entre les entrepreneurs culturels et les institutions éducatives doivent être réalisés, les institutions muséales doivent davantage marketer la culture auprès de cette cible qu’est l’enfance à travers des visites guidées gratuites (et obligatoire) pour tous les établissements du primaire au secondaire afin d’inculquer en eux les valeurs de la diversité culturelle, etc.

Le second enjeu est symbolique.

C’est le rôle de l’Etat de promouvoir tous les secteurs culturels (musique, cinéma, théâtre, gastronomie, spectacle vivant, mode etc.) car au-delà de la richesse économique, ils sont porteurs de richesses symboliques qui façonnent l’imaginaire des peuples et la pensée individuelle. Alice Ellenbogen [5] nous rappelait déjà que la puissance d’une Nation est davantage culturelle que politique. Autrement dit, la puissance culturelle précède la puissance politique et économique. C’est aussi la position de SENGHOR (Senghor, 1964) quand il affirme : « l’impérialisme culturel, nous l’oublions trop souvent est la forme la plus dangereuse du colonialisme : il obscurcit la conscience.[6] » Il n’y a pas de puissance émergente qui n’ait pas utilisé la culture pour imposer son savoir-faire et son génie dans le monde.

Toujours dans ce cadre, les institutions comme le ministère des Arts et de la Culture, le ministère du Tourisme, le ministère de l’Enseignement Supérieur, le ministère des Relations Extérieurs, le ministère de la Communication etc. ont un volet de soutien à la culture et doivent désormais identifier les initiatives des jeunes afin de les soutenir. Ils doivent organiser des manifestations culturelles régulièrement.

On pourrait instaurer le mois national du tourisme pour permettre aux Camerounais du Centre d’aller vers le Nord ou du Sud vers l’Ouest et vice versa. Au-delà de la mobilité nationale, on doit également promouvoir le tourisme sous-régional avec le Congo, la Centrafrique, le Gabon, le Nigeria… Le Cameroun représente l’Afrique en miniature et regorge donc d’une diversité impressionnante et nous devons nous appuyer sur ce levier.

Enfin, la question du développement des entreprises des industries culturelles et créatives s’est intégrée dans la réflexion des acteurs culturels, dans plusieurs pays africains, en vue d’une appropriation des normes les caractérisant. Ce discours mérite une clarification, dans un environnement qui fusionne le formel et l’informel dans la création de richesses. Les entreprises des industries culturelles se présentent en effet comme les outils de création de richesses économique au Cameroun. Car elles permettent d’accroître la capacité de créer et de faire circuler le capital intellectuel économique et symbolique, tout en favorisant l’inclusion sociale, la diversité culturelle et le développement humain.

 

[1] Jean-Philippe DURAND, Le marketing des activités et des entreprises culturelles, Lyon, Agec-Juris Services, 1991

[2] Saliou Ndour, « Le développement des industries culturelles: une exigence de l’Afrique dans le contexte de la mondialisation », 2008.

[3] Philippe Bouquillion, « Incidences des mutations des industries de la culture et de la communication sur les contenus informationnels », Cahiers du Journalisme, vol. 20, 2009, p. 44–63, p. 44.

[4] Nous préférons éviter de citer des titres ou des exemples car la qualité d’une œuvre est aussi subjective.

[5] Alice Ellenbogen, Francophonie et indépendance culturelle : des contradictions à résoudre, Editions L’Harmattan, 2006.

[6] Léopold Sédar Senghor, « De la liberté de l’âme ou éloge du métissage », ders.: Liberté I. Négritude et humanisme, Paris, 1964, p. 98–103.


Les superhéros africains peuvent-ils rivalisés avec ceux des grands studios étrangers ?

Est-il possible de mettre un terme à l’hégémonie de Batman, Superman ou Spider Man sur l’imaginaire africain ?

Est-il possible que Guardian Prime, le Superman africain, protecteur du genre humain, crée en 2013 par Jide Martins de Comic Republic, puisse rivaliser aux Quatre Fantastiques, Spider-Man, Hulk, Iron Man ou encore les X-Men crées dans les années 60 par Stan Lee et Jack Kirby de Marvel Comics?

Guardian-Prime - African superhero by Comic Republic @ Anime Complexium
Guardian-Prime – African superhero by Comic Republic @ Anime Complexium

Kweti, le premier Super-héros africain publié en 2014 par Loyiso Mkize, peut-il rivaliser avec Batman de Marvel Comics ?

A ces questions rhétoriques, je réponds OUI ! Comme je l’ai souligné dans un précédent post, il s’agit davantage d’un enjeu symbolique qu’économique. La perception que l’on a du monde influence considérablement notre représentation au monde. Ce qu’on pense définit ce qu’on est et dans une large mesure ce qu’on a. En effet, l’imaginaire est un facteur déterminant pour booster l’action. Or la bande dessinée ou le cinéma d’animation a cette capacité, à travers les superhéros qu’elle peint, d’insuffler la confiance en soi et la fierté d’être africains à chacun de nos enfants.

Ces derniers ne se verront plus seulement comme des vaincus, des rescapés, des malnutris, des naufragés mais se verront comme des conquérants, des sauveurs, des bienfaiteurs, des personnes capables d’impacter positivement le monde. Et c’est là que ça change tout. Parce qu’à partir du moment où on a confiance en soi, on est capable n’importe quoi. Quand on est capable de rêver grand et bien, l’impossible devient possible. Si vous croyez que vous pouvez faire quelque chose, alors c’est possible. La seule limite existante est celle que vous vous mettez.

« Nous devons d’abord faire en sorte de changer le regard misérabiliste que beaucoup portent souvent sur nos pays» , observe à cet effet le dessinateur nigérian Roye Okupe, cofondateur de YouNeek Studios.

Superhéros© YouNeek Studios @Ngnaoussi Elongue
Collection de superhéros africains du Studio Youneek © YouNeek Studios

Dans les années à venir, Jide Martins espère voir le nom Comic Republic devenir une référence aux cotés de nom comme DC et Marvel. Et aussi que les enfants, dans leur jeu ou moment de doute, pourront dire : « Que ferait Ananse ? Guardian Prime ? Kwesi ?..

Mais pour y parvenir, il est important de lever certains freins et obstacles au développement de la bande dessinée sur le continent.

Le 9ème art africain est un art reconnu

En tant que langage, la BD africaine entretient un rapport avec les médias. D’une part, les quotidiens, hebdo et magazine (presse écrite) demeurent le principal lieu d’éclosion des artistes. Beaucoup de dessinateurs y ont  publié  leurs  premières  planches  et d’autres y ont commencé comme caricaturistes. C’est le cas par exemple de Joël  Ebouémé  Bognomo,  caricaturiste et illustrateur jeunesse,  actuellement  chargé  des  expositions  au  sein  de  l’ONG  Irondel, une association qui lança depuis 1999 la première édition du festival de caricatures et de l’Humour de Yaoundé.

D’autre part, la  BD  est  à  comprendre  aussi comme média au service de la société. La BD remplit les trois fonctions traditionnelles des médias : informer, former et divertir ses lecteurs. Elle explique parfois aux lecteurs ce  qui se passe dans leur société et éduque en leur montrant ce qu’il ne faut pas faire ou les  attitudes  à  adopter. C’est le cas par exemple du magazine 100% Jeune qui a eu un très grand impact dans les campagnes nationales de sensibilisation contre le VIH SIDA auprès de la jeunesse camerounaise.

…mais un média méconnu

Cependant, la BD africaine est un média méconnu parce que confrontée à de multiples difficultés qui freinent son développement et surtout son éclosion en tant que média à part entière. Il s’agit, entre autres, du manque de formation des artistes, du manque de maisons d’édition spécialisées, de l’insuffisance des circuits de diffusion et de distribution, de l’absence de structure de promotion du livre en tant que produit de consommation et de diffusion de la culture.

Un autre phénomène très important qui endigue la reconnaissance de la BD africaine et sa croissance concurrentielle à l’endroit de Marvel ou DC Comics, est sans aucun doute l’omnipotence de la « lecture utile » au détriment de la « lecture plaisir ». Les gens ne lisent que par nécessité ou contrainte dans un cadre scolaire. Si un jeune n’a pas de devoir ou d’exercice littéraire dans une œuvre, il est rare de le voir lire. Or la lecture plaisir, surtout celle de la littérature jeunesse, est nécessaire au développement de la personnalité et à la réussite scolaire.

De ce fait, la bande dessinée reste assimilée à la littérature enfantine. Pourtant c’est un véritable paradoxe puisque l’essentiel de la production est plutôt orienté vers les adultes. Il est donc très rare de voir un adulte lisant un album, si ce n’est dans les milieux aisés et urbains. Les raisons en sont culturelles (un adulte ne lit pas de la « littérature pour enfants ») et financières (les albums de bande dessinée coûtent très cher).

First Fin_Leti Arts
First Fin© With the courtesy of Leti Arts

Il est donc important de soutenir la création artistique et culturelle et de mieux structurer le marché des biens symboliques sur le continent afin que les artistes puissent vivre dignement de leur travail. Pour se financer, la startup nigériane Comic Republic met en œuvre des projets parallèles avec diverses organisations. Leti Arts quant à elle survit grâce à des jeux mobiles publicitaires ou à des études de marché commandités par des organismes travaillant dans les domaines de la santé, de l’éducation, de la culture ou des droits de l’homme, car ils sont conscients de l’importance que les jeunes attachent à la bande dessinée et au jeu.

Les acteurs de la filière se doivent de développer rapidement des produits dérivés de ces BD et de sortir du périmètre afro-africain pour s’étendre au reste du monde. Pour s’imposer, ils ne devront pas se limiter à créer des personnages africains pour les Africains, à conter des aventures qui risqueraient d’être perçues comme folkloriques. C’est une étape importante pour pérenniser et accroitre la vitalité du 9ème art sur le continent africain.


Quand la bande dessinée kidnappe l’imaginaire des enfants africains

Quand la littérature jeunesse prend en otage l’imaginaire…

Dans le cadre de la préparation de la fête nationale du Ghana (6 mars) et de la journée internationale des droits des femmes, une école privée internationale d’Accra a organisé une série d’activité scolaire où les élèves ont été amenés à participer à des concours de chants, de danse, de récit et de théâtre. A l’exception de la danse qui avait une coloration légèrement locale avec de l’Azonto, le reste des activités étaient fortement marqué par le sceau de l’influence étrangère. Lors de la représentation théâtrale, les enfants présentèrent le classique combat entre le « Gentil » et le « Méchant » représenté ici par Superman, Spider Man et Sangoku (Dragon Ball Z) contre Dracula, Magneto (X-Men) et Lex Luthor (Superman).

Pendant les activités, un enfant n’était pas très joyeux car ses parents n’avaient pu lui trouver le costume de T’Challa. Il voulait pourtant jouer le rôle de la Panthère Noire, le super-héros 100 % africain de Marvel. Et en parcourant furtivement la bibliothèque scolaire de cette école, je constatais qu’environ 70% du catalogue était constitué de livres jeunesses d’auteurs américains, anglais, canadiens, belges et français. La littérature enfantine locale y était noyée, à peine visible dans les rayons. Si on vous y transportait sans vous dire dans quel pays vous êtes, vous vous croiriez dans la bibliothèque scolaire d’une cité européenne ou asiatique.

Seulement quelques jours plus tard, j’assistais à une cérémonie de remise des prix d’un concours littéraire organisé à l’occasion de la Semaine de la Francophonie. La première lauréate, Yaa Laudina, une élève de 8 ans, a écrit un merveilleux récit sur Blanche Neige et les sept nains. Le second prix a été décerné à Kofi Barko, un petit garçon dont le texte reprenait les aventures de Robin des Bois ! Ces héros, ils ne les ont jamais vus autre part que dans les livres, au cinéma ou dans les dessins animés (animation).

Comment une jeune fille de 8 ans peut-elle décrire les aventures et l’environnement de Blanche Neige alors qu’il n’a jamais neigé au Ghana et qu’elle n’a jamais vu de ses yeux même l’ombre ou le fantôme d’un grain de neige ? Comment de jeunes enfants peuvent-ils se bagarrer avec des interjections chinoises : Watchaïi ! Hiyyaaa ! Wouss wouss ! Adou Get ! ou faire des jeux avec des poupées « Barbie » ?

Ces enfants Ghanéens ne sont que des exemples parmi des millions d’autres enfants, jeunes adolescents et adultes dont l’imaginaire a été longuement formaté, corrompu, virusé et pris en otage par les arts créatifs et la culture étrangère. Moi-même, je suis un fan calé-serré des aventures pirates de One Piece avec Luffy et son équipage (Zoro, Sanji, Nami, Chopper, Brook, Robin, Franky, …). Inconsciemment, ces héros de bandes dessinées, de comics, de cinéma… s’ancrent dans notre conscience. On s’identifie à eux et ils parviennent ainsi à coloniser notre imaginaire alors qu’ils n’ont parfois rien à voir avec nos réalités quotidiennes, nos mœurs, nos traditions et pratiques quotidiennes.

De l’importance pour nos enfants de s’identifier à des héros africains

Des générations d’africains ainsi grandi sans pouvoir s’identifier ou se reconnaitre dans un super-héros africains. Mais avec la révolution numérique et technologique, les choses bougent et évoluent. Des artistes et créateurs africains frustrés par ces expériences sont désormais passés à l’action et créent de plus en plus de contenus qui s’inspirent de la tradition et culture africaine. L’émergence d’un univers de super-héros africains apparaît aussi comme une nouvelle étape dans la revitalisation de l’imaginaire et le mouvement pour l’affirmation, par les Africains, de leurs cultures. Un préliminaire pour booster l’action.

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Ananse:The origin @Leti Arts

La bande-dessinée et le cinéma d’animation ont cette capacité, à travers les héros qu’ils peignent, d’insuffler la confiance en soi et la fierté d’être africains à chacun de nos enfants. Ces derniers ne se verront plus seulement comme des vaincus, des rescapés, des malnutris, des naufragés, mais ils s’imagineront conquérants, sauveurs, bienfaiteurs, des personnes capables d’impacter positivement le monde. Et c’est là que ça change tout. Parce qu’à partir du moment où on a confiance en soi, on est capable de n’importe quoi. Quand on est capable de rêver grand et bien, l’impossible devient possible. Si vous croyez que vous pouvez faire quelque chose, alors c’est possible, la seule limite existante est celle que vous vous mettez.

Leur faire découvrir les héros de BD made in Africa et leurs créateurs.

Contrairement à la Tornade de la série X-Men de Marvel, et à T’Challa dans Panthère noire, qui sont tous deux originaires du pays imaginaire de Wakanda en Afrique, les personnages de Eyram Tawiah, Olivier Madiba, Barly Baruti, Elyons… sont d’authentiques Africains nés et élevés sur le continent. Plus besoin de s’identifier à des ninjas, des ogres, des chaperons rouges, des dragons, des elfes car selon Hilaire Mbiye Lumbala, la BD africaine est un art reconnu qui possède elle aussi ses propres héros. Nous pouvons mentionner par exemple Yirmoaga au Burkina Faso ; Zoba Moke au Congo Brazzaville, Mata-Mata et Pili-Pili, Apolossa au Congo démocratique ; Dago, Monsieur Zézé et Cauphy Gombo en Côte-d’Ivoire ; Bibeng et Tita Abessolo au Gabon ; Tékoué en République centrafricaine ; Boy Melakh et Goorgoolou au Sénégal, etc.

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Aurion: Legacy of the Kori-Odan_La BD @ Kiroo Games

Plus récemment, citons Olivier Madiba de Kiroo Games dont le jeu vidéo Aurion a été adapté en bande dessinéegrâce à l’illustrateur et dessinateur Georges Pondy. Il est désormais disponible ici. Eyram Tawiah, avec son application mobile Afrocomix, vous donne accès à des contenus africains (BD, fonds d’écrans, courtes animations…) inspirés des récits et de la culture africaine et destiné au public africain, à la diaspora et à toute personne ayant soif de contenus originaux et authentiques sur l’Afrique.

Au delà de ces contenus digitaux, vous pourriez également emmener vos enfants à des événements où ils pourront rencontrer les créateurs de ces univers fantastiques. Cela renforcera le lien affectif qu’ils entretiennent avec ces héros de bandes dessinées. Je pense par exemple au Festival Mboa BD au Cameroun, au Salon de la bande dessinée de Kinshasa, au Festival Coco bulles d’Abidjan, le Salon de la bande dessinée de Bamako, Îl’en bulles de Port Louis (Île Maurice), Gazy bulles de Tananarive (Madagascar), les festivals de Tétouan, au Maroc, et Tazarka (12 éditions), en Tunisie. Et enfin et surtout le Festival international de bande dessinée d’Alger qui propose un plateau important d’auteurs européens et africains.

De nos jours, plusieurs associations de dessinateurs œuvrent sur le continent. On peut citer au Mali, le Centre de la bande dessinée de Bamako qui regroupe au sein d’une même structure tous les dessinateurs professionnels du pays ; à Kinshasa, Kin Label qui édite un journal du même nom. Enfin, on peut également citer l’association L’Afrique dessinée ou AfriBD, qui regroupent des dessinateurs africains évoluant en Europe et qui interviennent régulièrement sur le continent.

Voilà j’espère que cet article vous aura sensibilisé davantage sur l’importance d’acheter, d’offrir ou de faire lire des bandes dessinées ou livres jeunesse africains à vos enfants ou même ceux du voisin 🙂 . Si vous le faites déjà en tant que parent, prière de partager votre expérience en commentaire. Si vos parents l’ont fait pour vous, dites nous comment cela vous a influencé. A bientôt !


Le voyage le plus inutile de l’année 2018

Le vendredi dernier, je recevais un appel d’une institution internationale qui voulait planifier mon entretien d’embauche, suite à une candidature envoyée 6 mois auparavant. Ayant déjà trouvé un emploi, j’étais assez hésitant et le fait que je devais voyager pour aller faire l’entretien dans une autre ville, n’arrangeait pas trop les choses. Après réflexion, je décidais finalement d’accepter ce voyage pour Kumasi, située à plus de 443km d’Accra.

Pourquoi ? me demanderais tu certainement.

Tout simplement parce que l’entretien était pour un nouvel emploi dans le secteur de l’éducation, une passion de premier ordre pour moi comparé au secteur de la communication digitale dans lequel j’exerce actuellement. Le rendez-vous d’entretien fut donc fixé pour le lundi à 11H30.

Je passais ainsi le weekend, aspiré par le travail sur d’autres projets et ce n’est que lundi matin aux environs de 1h20 que je daigne me consacrer à la préparation de mon entretien. En effet, j’allais être testé. Il fallait donc que je prépare le scénario et le contenu de ma présentation. Déjà amorti par la rédaction de mon dernier article scientifique sur l’industrie africaine des jeux vidéo, je devais donc puiser toute parcelle d’énergie restante en moi pour y parvenir. Mais c’est là que le ndem (l’imprévu) allait commencer.

A 3h21, j’étais en train d’imaginer le scénario de la présentation quand je fus pris en otage, arrêté et emprisonné sans sommation, par Morphée.

Ce n’est qu’à 6h12, que j’ouvris les yeux. J’étais enragé contre moi-même car j’avais prévu aller à la gare vers 4h30 au plus tard, pour prendre les premiers bus à destination de Kumasi. Je ne m’étais même pas encore douché…

7h43 : Enfin ! J’arrivais à la gare routière. Comme je le craignais, les premiers bus matinaux étaient déjà partis. Puisque l’entretien était à 11h30, je me dis que je pouvais bien y arriver si je trouvais le bus qui quitterai le plus tôt possible. Un cœur me souffla de ne point voyager, mais je décidais de ne point l’écouter en achetant mon ticket.

8h54 : Enfin ! Le bus se décidait à bouger. Ouf !  La gorge nouée par l’anxiété, j’imaginais déjà ce bus avec des ailes. Mais les klaxons tintamarresques des embouteillages me ramenèrent vite à la réalité. J’ouvrir les portes du livre d’Eyram Tawiah « Uncompromising Passion », pour échapper aux critiques de ma conscience qui me disait :

« Cédric, on t’a maudit avec le retard ? Pourquoi ne t’es-tu pas couché tôt pour te lever tôt ? Sais-tu que ça donne une très mauvaise impression d’arriver à un entretien d’embauche en retard ? »

Heureusement, la lecture du livre m’enivra et me livra aux dérives de l’imaginaire de l’auteur, qui racontait sa passion pour les jeux vidéo et les bandes dessinées depuis son enfance.

10h15 : Le bus faisait la 1ère pause du trajet, me permettant de me détacher momentanément du voyage imaginaire dans lequel la lecture m’avait plongé. Il était 10h15. Je fis instantanément le calcul mental. Il ne me restait plus que 1h15 minutes. En m’adressant à mon voisin, je priais secrètement que nous soyons déjà à mi-parcours :

  • Nous sommes à combien d’heure de Kumasi svp ?
  • Humm ! Entre 3 et 4h monsieur ! Nous sommes encore très loin ! me rétorqua-t-il après avoir regardé par la vitre pour voir le lieu où nous étions.

J’avalais une grosse boulée de salive, réalisant qu’au mieux j’arriverai à 13h15 ou 14h15 au plus tard.

14h46 : Enfin ! Je suis à Kumasi ! Les longues heures de route m’ont permis d’achever de lire l’histoire de Tawiah. A la descente du bus, j’appelle un Uber mais constate qu’il n’y en a aucun de disponible pour ma destination. Me voilà qui tombe alors les fameux « Trotro », moyen de transport populaire au Ghana. J’étais convaincu de ce que l’Institution où je me rendais devait être au centre-ville.

Mais après 20 minutes dans le bus, je m’enquérais auprès du « motorman » (assistant du chauffeur) :

  • Please this place is still far from here (Svp, ma destination est-elle encore loin d’ici ?)

Il me répondit en Twi, la langue locale. Je n’avais rien compris : kickok ! Et je ne savais point comment le dire en dialecte local. Frustré, cela me rappelait l’urgence de m’inscrire à des cours de Twi pour compléter mon intégration au sein de la société ghanéenne.

Motorboy_petit chauffeur_trotro _ accra
Un motorman en quête de passagers à Accra @Flickr

Heureusement, il « ramassa » un nouveau passager et ce dernier comprenait l’anglais. Après consultation, il m’informa que ma destination était encore à au moins 1h de notre position.

J’étouffais de rage. J’avais envie de me gifler, hurler ou simplement sauter par la fenêtre. Mon retard était exagéré ! Je me rappelais qu’il fallait appeler pour prévenir de mon arrivée, même tardive. J’appela et la secrétaire m’indiqua que les séances d’entretien étaient clôturées depuis belle lurette et qu’il n’était plus nécessaire que j’y vienne.

Là, j’ai pensé descendre du bus et ne plus y aller. Mais à quoi cela servir a-t-il d’avoir fait tout ce trajet pour ne même pas arriver à destination ? Ne penseront-t-ils pas que je ne suis pas sérieux ? Ayant confirmé ma présence sans pour autant apparaitre le jour J ? Après réflexion, je me résignais donc à poursuivre le chemin, espérant trouver au moins un membre du staff pour leur expliquer ma mésaventure et au moins leur prouver que j’étais effectivement présent dans la ville pour mon entretien.

16h37 : C’est à cette heure que j’arrivai enfin à l’institution. Le gardien m’informa que le staff et l’ensemble du personnel administratif avaient déjà quitté les lieux depuis 16h. J’ai essayé d’appeler la secrétaire mais la ligne ne passait plus.

La rage qui consumait déjà mon cœur s’enflamma davantage. Je répétais interminablement « Merde ! » « Sokcellerie ! » « Foutaise ». Si j’avais eu un mur devant moi à l’instant, je l’aurais défoncé à mains nues. Que devais-je faire ? Dormir en espérant obtenir un nouvel entretien le lendemain matin ? Ou rentrer sur Accra ? Après tout, on ne m’avait accordé qu’un seul jour d’absence au travail. En dormant, je risquais ainsi perdre une nouvelle journée de travail. Et je n’étais même pas certain qu’il accepterait de m’accorder cet entretien.

Après réflexion, je me résignais à rentrer sur Accra. Sur le chemin du retour, j’ai pensé à toutes les dépenses réalisées pour en arriver là. J’ai pensé à toute cette fatigue et tracasseries engrangées dans les transports. Et cela me laissa un gout amer : je venais surement de réaliser le voyage le plus inutile de mon année 2018.

La rage passée, mon esprit s’exerça à dénicher les leçons que je pouvais et devais tirer de cette expérience. Car pour moi, toute chose ou évènement a toujours un côté positif. Il suffit d’adopter le regard nécessaire, changer de paradigme pour s’en apercevoir. Voici donc les trois leçons que j’en ai tiré:

1. Ne jamais s’engager à moitié dans un projet, aussi petit soit-il.  

Après la confirmation de l’entretien, j’ai beaucoup hésité sur la nécessité de voyager. C’est pourquoi j’ai paressé dans sa préparation. J’aurai pu appeler des amis résidant à Kumasi pour avoir une idée sur l’emplacement du lieu où je me rendais avant d’y aller. J’aurai même pu voyager le dimanche soir pour arriver très tôt le lundi matin. J’aurai pu… J’aurai pu…

2. Ne jamais sous-estimer un projet, aussi minime soit-il.

If you fail to plan, you plan to fail ! Planifier c’est prévoir l’imprévisible. Je me suis dit que ce n’était qu’un petit voyage. Je n’ai par conséquent pas pris les mesures nécessaires pour le préparer sérieusement. Cette négligence est la principale cause d’échec de ce voyage. Un projet peut sembler insignifiant mais avoir des conséquences significatives. Et c’est en gérant les petits projets qu’on apprend à gérer de plus grands.

3. Mieux vaut reconnaitre et accepter une bêtise tôt puis changer de trajectoire que de persister dans la bêtise.

Un tiers aurait tout simplement annulé son voyage en constatant que les premiers bus du matin étaient déjà partis. Car ne voulant point arriver en retard. Un autre, parvenu à Kumasi très tardivement, n’aurait pas poursuivi le trajet ou serait immédiatement rentré après avoir appris que les entretiens étaient clôturés. Mais… comme je sais parfois être têtu comme une mule, j’ai insisté, résisté au découragement et persisté dans ma bêtise. J’aurai pu épargner de l’argent et du temps en reconnaissant et stoppant ma trajectoire plus tôt.

Mais bon !

Je me dis aussi qu’il fallait que ça arrive. Ça fait désormais partie de mon expérience. Les gens vous voient souvent bien faire les choses et pensent que c’est facile. Ils ignorent les nombreuses défaites, échecs, découragement, crises, conflits que vous avez enduré et surmonté pour en arriver là. Grace à cette expérience, je préparerai désormais mieux mes futurs voyages même s’ils ne sont qu’à quelques kilomètres de distance comme Mbanga-Loum (pour aller visiter mon arrière grande mère) ou Dschang-Bafoussam (pour aller dans mes mapanes 😊).

A+


A la découverte d’Afrocomix, application mobile avec des BD et animations made in Africa

Êtes vous capable de me citer le nom de cinq super-héros africains ? Êtes-vous capable de me citer le nom de cinq super-héros étrangers ? Si vous répondez non à la première question et oui à la seconde, vous devez absolument lire ce billet jusqu’à la fin.

Même si j’adore Black Panther, super-héros de Marvel, n’oublions pas qu’il vient d’un pays africain imaginaire : le Wakanda. Afrocomix vous présente des bandes dessinées, animations et papiers peints et histoires avec des super-héros nés et évoluant en Afrique.

C’est même quoi Afrocomix ?

Afrocomix est une application mobile développée par Leti Arts, qui vous donne accès à des contenus africains (BD, fonds d’écrans, courtes animations…) inspirés des récits et de la culture africaine (Cameroun, Ghana, Kenya, Egypte, Sénégal, Afrique du Sud, Zimbabwe…) et destinés au public africain, à la diaspora et à toute personne ayant soif de contenus originaux et authentiques sur l’Afrique. L’ambition d’Afrocomix est d’être la plateforme mobile incontournable pour l’accès aux contenus de BD et fonds d’écran authentiques en Afrique.

Papier Peint © Leti Arts @ Ngnaoussi Elongue
Quelques papiers peints © Leti Arts

Les papiers peints peuvent être téléchargés et ajoutés comme fonds d’écran dans vos téléphones ou partagés sur les réseaux sociaux. Cette plateforme est le fruit de la collaboration entre le studio Leti Arts et d’autres studios africains (Kola Studio, Etascope Studios, Epoch Studios, Meteor Comics Media, Organized Khaos et Venus  Bambisa). C’est une très belle initiative qui m’a immédiatement séduit par sa dimension fédératrice et son importance symbolique.

Sa dimension collaborative dans la fédération des créateurs

La faible coopération intra-africaine a longtemps été à l’origine de l’échec de nombreux projets innovants sur le continent. En s’associant avec d’autres créateurs pour travailler main dans la main, Eyram Tawiah, CEO de Leti Arts, fait preuve d’une vision stratégique importante, surtout pour une filière des industries créatives où les créateurs, malgré les efforts remarquables qu’ils produisent, génèrent peu d’impact parce qu’évoluant ou travaillant seul. L’impact fragmenté devient compact et intact lorsqu’on travaille avec tact.

Il est ainsi possible pour tout créateur ou illustrateur de bandes dessinées africaines, free-lance ou en studio, de soumettre son contenu à Leti Arts (publish@letiarts.com) afin qu’il puisse être distribué sur la plateforme et mis à la disposition de la communauté déjà grandissante. Ce dernier recevra des rapports hebdomadaires et les revenus sur son contenu dans l’application Afrocomix.

La dimension symbolique d’Afrocomix et son influence sur l’imaginaire africain

Afrocomix est d’une importance symbolique capitale parce que cela ravive et revitalise l’imaginaire des enfants et adultes africains. A la suite de Black Panther, Afrocomix vous offre une escouade de super-héros noirs nés et restés sur le continent appelés Africa’s Legends.

 Superhéros noirs appelés Africa’s Legends © Leti Arts Ngnaoussi Elongue
Super-héros noirs appelés Africa’s Legends © Leti Arts

L’excellente réception du film Black Panther est une preuve suffisante qui prouve que le monde est prêt voire impatient à découvrir un autre visage de l’Afrique, loin des récits de misère et de conflits véhiculés par les médias. Ainsi des films comme Blood Diamond, Congo et Black Hawk Down dépeignent une Afrique déchirée par la guerre et diffusent des stéréotypes comme si l’Afrique n’était qu’un grand pays, alors que nous sommes le deuxième plus grand et plus peuplé continent au monde.

A travers Afrocomix, « nous rêvons que nos histoires, qu’il s’agisse de jeux ou de bandes dessinées, continuent d’influencer la perception globale du continent » déclare à ce propos le promoteur Eyram Tawiah, enseignant à Melt Entrepreneurial School of Technology, et afropolitain engagé pour le développement endogène de l’Afrique. Il encourage les africains à continuer d’écrire, de dessiner et de créer des histoires inspirantes pour célébrer l’Afrique et inspirer la jeunesse africaine et le monde.

« Il est important de montrer à l’Afrique et au monde ce que les Africains sont capables de faire […] Il faut aussi montrer que rien n’est impossible », expliquait à Jeune Afrique le dessinateur Jide Martin, fondateur de la start-up nigériane Comic Republic, qui s’est donner pour mission de créer des super-héros capables de rivaliser avec Iron Man, Batman et Spider-Man. C’est aussi le cas d’Olivier Madiba de Kiroo Games qui a récemment réalisé la bande dessinée tirée du célèbre jeu vidéo RPG Aurion. Elle est disponible gratuitement ici.

Afrocomix, une application au service de l’éducation  

On connaît les dieux grecs comme Zeus, Athena… mais personne n’a encore entendu parler de Shango, le dieu de la foudre chez les Yorubas ou d’Ananse, le Dieu de la Sagesse au Ghana

Ananse © Leti Arts @Afrocomix
Ananse, considéré comme le Dieu de la sagesse dans les récits d’Afrique de l’Ouest © Leti Arts

En Afrique, la BD est « un médium pour toutes les couches de la population, y compris pour celles qui n’ont pas la culture de la lecture ou qui n’ont pas la télé »[1]. En tant que média éducatif, Afrocomix a donc une portée pédagogique pour sensibiliser et vulgariser. Sans prétendre à l’exhaustivité, les thèmes suivants sont développés : la lutte contre le Sida, l’excision  ou la toxicomanie ; les personnages historiques ; l’immigration, la corruption et les problèmes liés à l’environnement et à l’urbanisme.

Ce serait agréable de rencontrer un jeune petit français ou belge en train d’imiter nos héros, nos interjections. Et qu’on ait davantage de T’challa, de Shuri, de Blade, de super-héros africains. Et pourquoi pas réaliser des BD sur des leaders africains comme Thomas Sankara, Kwame Nkrumah, Mouammar Kadhafi, Robert Mugabé, Nelson Mandela… A travers le pouvoir de l’art sur l’imaginaire de la création et l’action,  je crois que le Wakanda est appelé à devenir une réalité. Afrocomix s’inscrit dans cette vision.

Il est donc très important que cette application puisse être diffusée ou distribuée au maximum de jeunes possible. Que chacun puisse la télécharger et découvrir les récits illustrés d’Afrique, de même que les papiers peints de créateurs africains. Je t’invite donc à passer la nouvelle autour de toi. Nous savons combien cette plateforme est importante pour la construction d’une mentalité de gagnant en nous. Après Black Panther, la révolution culturelle et artistique sur le continent est en marche. Joins le mouvement ! Faisons la promotion de nos produits au monde ! Donnons l’envie aux autres de découvrir nos histoires, nos héros, nos coutumes, nos valeurs, nos humeurs, nos cris, nos bruits, nos senteurs, nos odeurs, notre langage… à travers les arts et la culture.

Que peux-tu faire pour participer au mouvement Afrocomix ?

Afrocomix Download © Leti Arts

Déjà aux Etats-Unis et à travers 51 pays à travers le monde, une gigantesque campagne de crowdfunding, le #BlackPantherChallenge, a été lancée pour permettre à des millions d’enfants africains ou afro-américains d’aller voir Black Panther au Cinéma. Tous les enfants ont le droit de rêver et de croire qu’ils ont le pouvoir de sauver le monde.

Leti Arts n’a point démarré de campagne de financement participatif. Mais je pense qu’on peut contribuer à promouvoir cette initiative de différentes manières :

  • Partager le présent billet sur les réseaux sociaux. Même si tu n’es pas intéressé, il y a surement des personnes autour de toi qui seraient ravies de télécharger Afrocomix pour y lire des BD.
  • Ecrire un autre billet sur Afrocomix à partir de ta propre expérience puis le partager sur un blog ou sur les réseaux sociaux.
  • Depuis l’application, partager les dessins ou fonds d’écrans. En partageant, vous débloquerez de nouveaux contenus et cela encouragera les autres à en faire autant. En ajoutant les hashtag : #Afrocomix, #letiarts, #Africalegends #AfricanSuperheroes on pourra récupérer votre post et le partager sur le mur Facebook de Leti Arts.
  • Parler de l’application à votre frère, sœur, ami ou toute personne autour de vous. Ce n’est pas aux autres de faire la publicité pour nous. Apprenons à valoriser et encourager nos créateurs.
  • Laissant une critique sur le Google Play Store afin de permettre l’amélioration de l’application.

Vous pouvez télécharger l’application Afrocomix ici : https://play.google.com/store/apps/details?id=com.letiarts.afrocomix&hl=en

Abonnez-vous à leur site web et réseaux sociaux (FacebookTwitter et Instagram) pour ne rater aucune mise à jour.

Pour découvrir l’univers Afrocomix, je vous ai sélectionné quelques papiers peints et extraits de BD, parmi les plus populaires auprès des lecteurs.

[1] « La BD peut être un grand médium pour toutes les couches sociales », Africultures, n° 32, 2000, p. 27


Entretien métaphysique avec la langue française

Ce texte a été rédigé dans le cadre du Concours littéraire « Ma Parole » organisé par l’Ambassade de France au Ghana à l’endroit du public francophone dans le cadre de la Semaine de la Francophonie 2018 sous le thème « Le français en Afrique : langue du passé, du présent ou de l’avenir ? ». Ce concours d’écriture s’inscrit dans le projet de coopération culturelle internationale « Dialogues artistiques transatlantiques Caraïbe(s) – Afrique(s) » porté par l’Institut Français du Ghana et la Délégation Générale de l’Alliance française au Ghana avec le soutien des collectivités et des services de l’État de Martinique et de Guadeloupe. Le présent texte fut lauréat du 2nd Prix de la Catégorie Grand Public. Ce récit est une œuvre de pure fiction. Par conséquent toute ressemblance avec des situations réelles ou avec des personnes existantes ne saurait être que fortuite. Bonne lecture ! 

Prologue

  • « Murielle, réveille-toi ! Il est déjà 7h34 min et tu ne t’es même pas levé pour te préparer pour l’école ! » entendis-je dans ma torpeur, à moitié endormie et éveillée. « Bien que diffuse, j’étais presque certaine que la voix provenait de l’autre côté de la cloison, de la chambre de maman. Voilà bientôt 18 ans que j’endurais ce refrain rocailleux à mon réveil. Dès qu’elle ouvrait les yeux, le premier nom qui sortait de sa bouche était le mien. Voilà bientôt 18 ans qu’elle avait ainsi court-circuité mes rêves. »

Mais ce matin, elle essaya de rattraper son rêve, cette fois très beau, puisqu’elle était dans la peau de Ororo, épouse de T’challa, roi du Wakanda. Elle feint donc n’avoir pas entendu la voix de sa mère, à la recherche du rêve perdu. Après une dizaine de minutes, en vain, elle abandonna. Puis, elle prit son bain, récupéra son pain et se rendit à l’école. Elle était en classe de terminale.

Murielle était une grande rêveuse. Elle tenait cela de son père, qui était un conteur professionnel. Petite, elle l’accompagnait dans sa tournée de la région. Elle aussi aimait rêver et raconter des histoires. Elle ne s’en privait pas, et ce depuis qu’il l’avait prématurément quittée. Il lui suffisait d’une anecdote ou d’une image pour laisser libre cours à son imagination et à sa fantaisie. Avec les rêves, elle pouvait contrôler sa réalité, créant de toutes pièces un monde à part aussi merveilleux qu’insaisissable. Ce jour-là, c’était un 21 janvier, son enseignante acheva un cours sur la Francophonie. Comme exercice, elle leur demanda d’imaginer des actions qui pourraient dynamiser la langue française en Afrique.

Murielle prit une feuille blanche, qu’elle posa devant elle puis se mit à la fixer. En observant son regard fixe, intense, presque exorcisant, on aurait pensé qu’elle y lisait des lignes invisibles. Perdue dans ses pensées, Murielle essayait tout simplement de penser la langue française non plus comme objet de discours mais comme sujet. Si cette langue avait une voix, que dirait-elle ? Lui demande-t-on souvent son avis sur les questions la concernant ?

Alors qu’elle était perdue dans les méandres pittoresques de son esprit, elle glissa subrepticement dans le sommeil.

Une conversation avec l’au-delà

Lorsqu’elle ouvrit les yeux, le temps d’un clin d’œil, elle se trouva dans un studio radio, un casque microphone aux oreilles. En face d’elle, une dame très raffinée, qui semblait attendre une action de sa part. Elle lut « Mme Lingua Franca » sur son chemisier et comprit qu’il était temps de passer à l’action. Elle se lança, se laissant guider par la magie de l’instant présent :

« Salut à tous et bienvenue sur les ondes de la Radio Gallotopia FM, la chaine ou vos rêves deviennent réalité. Aujourd’hui nous irons à la rencontre d’une invitée tout à fait célèbre qui nous fait l’honneur d’être présente sur notre plateau aujourd’hui.

Mme LF…, pourriez-vous vous présenter à nos auditeurs ?

Je suis LF…, fille de Gregorius Stapounislos et de Latina Sylva. Je suis née aux alentours de 842. Mes parents sont très âgés aujourd’hui mais demeurent néanmoins importants. Mon enfance a été assez difficile car je n’avais pas de véritable repère identitaire. En effet, je n’étais pas le seul enfant à mes parents et en tant que fille, j’ai dû batailler davantage pour me faire respecter et gagner ma place auprès du soleil. Aujourd’hui, j’ai été bénie par Dieu et j’ai près de 275 millions d’enfants répartis aux quatre coins du monde mais majoritairement à Afritopia[1]. Je suis une racleuse[2], j’aime les voyages, l’Art et me faire de nouveaux amis.

Quel parcours édifiant. Si mes calculs sont bons, vous devez donc porter plusieurs siècles sur vos épaules ?

Hum ! (Elle rougit !) Oui c’est approximativement ça. Mais n’allez surtout pas penser que je suis une mémé rouillée et inutile. Bien que je sois légèrement vieille, je garde toute mon énergie, ma prestance et prend du wiski[3] de temps à autres. Ma mémoire est fidèle comme celle d’un chien. Et ne dit-on pas souvent que « seules les vieilles marmites savent faire de bonnes sauces… ». Dans l’œil du vieillard se trouve le chemin de la vie.

Avec une mémoire fidèle comme le porc l’est à la saleté, quels sont donc vos souvenirs d’enfance qui vous ont marqué ?

Il est assez difficile de répondre à cette question. Voyez-vous, mon adolescence et ma jeunesse n’ont pas été différentes de mon enfance : elles furent plus mouvementées et épicées. La vie nous réserve toujours des surprises, en mal comme en bien, c’est pourquoi elle mérite d’être vécue. Pour accompagner ma croissance et m’empêcher d’être « corrompue », mes parents m’ont confié à un tuteur, Robert Richelieu. J’étais assez bouillonnante, aussi ne pouvait-il pas assurer ma garde à lui tout seul et m’a donc entourée d’une pléiade d’écrivains et de poètes qui se sont chargés de mon éducation, ma protection et de ma défense. Comme toutes les filles de mon âge, j’ai connu quelques crises d’adolescence. Mais ils ont toujours été là pour me réconforter et me redonner confiance en moi.

Vous avez donc reçu une éducation classique et rigoureuse. En quoi cela a-t-il influencé vos choix dans la vie ? Qu’en est-il de votre éducation sentimentale ?

Lorsque je fus suffisamment instruite, j’acquis la liberté de m’autoriser des randonnées individuelles. C’est à cette période que j’ai commencé à flirter avec mes premiers amants. Le premier s’appelait Ouellet Tremblay. Il aimait les gens et leur rendait service à chaque fois qu’il pouvait. Il m’a comblée et aujourd’hui, nous constituons une famille de 7 274 090 personnes, soit 22 % de la population du Qanada. Mais de toutes mes relations, la plus belle des expériences que j’aie eu fut avec deux hommes virils et machos qui avaient connu la guerre, l’amour et la violence.

Le premier, Homère Césaire, était un mordu de poésie. Il ne jurait que par elle et me couvait sous des auréoles de mots si doux que je pouvais m’empêcher de jouir à leur ouïr. S’il y a une chose cependant essentielle qui le différenciait de mon autre amant Hugo Senghor, c’est sans aucun doute le style. Leur destin et éternelle complicité les accompagna outre-tombe puisqu’ils trépassèrent tous les deux à 95 ans. J’ai broyé du noir, au moment de leur mort, car ils ont beaucoup œuvré pour asseoir ma place dans l’imaginaire Afritopien.

Veuillez pardonnez mon indiscrétion, mais au regard de ces aventures, on pourrait penser que vous êtes frivole. Ou du moins que vous prenez plaisir à vous énamourer avec des étrangers.

Ne vous en faites pas, votre question est logique !  Mais comme je vous l’ai déjà indiqué, j’aime les voyages. Car ils me permettent de faire de nouvelles rencontres. Et s’il se trouve des personnes avec lesquelles mon cœur résonne, je perds la raison : ce fut le cas pour Hugo Senghor. S’il se trouve des peuples avec lesquels mon cœur entre chœur et en symbiose, je m’y pose.

C’est le cas par exemple d’Afrotopia, un lieu, une demeure où je suis arrivée par effraction mais où je suis demeurée par passion. Mais voilà c’est comme ça, je dois voyager pour vivre et je vis pour voyager. Je ne pourrai demeurer sur une terre. Je ne pourrai appartenir à un Homme. Je suis unique mais multiple. Seule mais peuplée. C’est l’essence même de ma vie. C’est ce qui donne un sens à cette vie. Si c’est de la frivolité, eh bien soit ! Pour moi, c’est de la mobilité.

Vous déclarez être en symbiose avec le peuple Afrotopien. Pourrait-on savoir comment ou pourquoi ?

J’ai connu le peuple Afritopien à travers et grâce à Hugo Senghor et Homère Césaire. Mais je dois avouer que nos rapports étaient houleux car s’inscrivant dans le cadre colonial. Le peuple était alors hostile et rebelle à ma présence. Ils ne voyaient en moi qu’une menace et je reconnais leur avoir donner toutes les raisons pour le croire. A l’époque fière, arrogante et jalouse, je désirais avoir toute l’attention et l’affection au point de cautionner la ségrégation de mes concubines afritopiennes. Là, j’ai essayé de conquérir l’amour du peuple par la violence et la coercition : tous ceux qui refusaient de m’honorer étaient sévèrement punis.

Mais j’ai fini par comprendre que la violence n’était point la solution, elle n’était que l’arme des plus faibles. Ses effets moins durables, s’effacent avec le temps. Désormais, j’ai compris que je devais faire la paix avec mes concubines afritopiennes, notamment Mme Twii Theresa au Ghana, Mme. Kiswahili Katy du Kenya, Mme. Fulfulde Falmata au Cameroun, pour ne citer que celles-ci.

Pensez-vous vraiment qu’il est possible d’avoir des rapports pacifiques et conviviaux avec vos concubines ?

Oui ! Je le pense sincèrement. Nous n’avons pas les mêmes rôles ni fonctions. Et nous sommes, d’une manière ou d’une autre, rattachées les unes aux autres. Lorsque l’une d’entre elle est menacée, je le suis également. Si elle meurt, c’est une partie de moi qui s’en va. Car au finish, nous formons un tout. Nos différences ne sont point des carences mais des richesses. Et c’est l’union de nos « univers dormants », leur symbiose, qui donne un cosmos linguistique hybride. Je suis fière aujourd’hui, non plus parce que je suis honorée d’être la plus courtisée mais parce que j’ai une paix dans l’âme, j’œuvre à mon niveau à la réussite conjugale de mes anciennes concubines en leur offrant des espaces d’expression et de création. Elles l’ont également fait pour moi, et aujourd’hui, j’ai des gendres un peu partout sur le continent.

Par exemple, lorsque j’effectue un voyage à Yaoundé, mon gendre Mboa[4] Martial me sert de guide en venant me récupérer depuis l’aéroport pour l’hôtel. Nous prenions ensuite un ben-skin[5], le seul engin capable de virguler[6] assez pour réussir à nous extirper des embouteillages éternels et asphyxiants, du chemin qui mène au restaurant « Nkondjock Délice ». Ce jour, j’y avais tchop[7] du Bongo Tchobi[8] avec une 33’’ bien glacée, une jong[9] du kwat[10]. Après avoir nang[11] jusqu’au chap, je prenais un autre vol le lendemain : direction Abidjan où je devais assister à une conférence.

Le lendemain, après avoir tergiversé et procrastiné pendant deux heures, je me décidais finalement à me rendre au marché local y acheter des souvenirs. Dans le taxi, le chauffeur me tympanisa les oreilles avec un rythme endiablé de Zouglou où je ne captais que quelques mots. Mais cette musique de Magic System l’enjaillait tellement qu’il conduisait tout en sifflotant et bougeant son corps. Le marchand de chaussures qui était…

Permettez moi de vous interrompre, Mme LF…, mais une fois de plus mais je vous avoue que je n’ai compris qu’un tiers de vos propos. Surtout à partir du moment où vous vouliez décrire vos relations pacifiques avec les langues africaines.

OH ! Je suis vraiment désolé mais je ne m’en étais pas du tout rendu compte. Mais il quasiment impossible de rendre fidèlement compte de ces réalités en employant mon lexique. Ces référents, pour la plupart, n’existent que dans ces pays-là. Ils ne gardent leur saveur que dans ce langage et le perdrait si je les traduisais. Nous sommes complémentaires et non compétitrices.  C’est donc pourquoi je disais qu’il était important pour moi d’avoir de très bonne relation avec mes concubines désormais sœurs afritopiennes…

Est-ce également le cas avec la langue anglaise Mme Lingua Anglia ? Ne pensez-vous pas que son apogée entraine votre périgée?

(Silence !) (Suivi d’un moment de silence. On voyait un léger rictus de sourire se dessiner sous ses lèvres).

Je reconnais que ma nièce de Londres, la langue de Shakespeare, est l’objet d’une attention sans précédent.  Je reconnais qu’elle s’insinue de plus en plus dans nos conversations quotidiennes, parfois même à notre insu. Mais, comme je l’ai déjà dit en évoquant mon rapport aux langues africaines, je ne considère point cela pour de l’adversité mais pour de la diversité.

Toutefois, nous sommes involontairement et inéluctablement entrainés dans une course terrifiante : celui de la compétition, sous-tendue par les ressorts capitalistes de notre société. À cette course, je ne veux et ne vais point participer. Car cela reviendrait à encourager l’émergence « d’identités meurtrières ». Le faire reviendrait à imiter ce qu’on observe dans la sphère religieuse où chaque confession est prête à tout pour capter le maximum de croyants. Jamais je ne me laisserais prendre à cet engrenage. Nous ne devons pas toujours rechercher le sommet en écrasant les autres, je ne sollicite ni l’apogée ni la périgée d’une langue sur une autre mais la « mésopogée » des langues, dans une esthétique de la relation et du divers.

Mme Lingua, à vous écouter, vous êtes bien optimiste. N’êtes-vous point entrain de sous-estimer l’épée de Damoclès qui pèse sur vous ? Ne craignez-vous pas perdre votre statut en Afrique et dans le monde ?

Je suis bien conscient de cette « menace ». Toutefois, cette épée de Damoclès ne repose pas que sur moi mais sur nous. La diversité linguistique et culturelle sont des prérequis pour l’avènement et l’établissement d’une paix durable dans le monde. De l’avenir de la langue française en Afrique dépend l’avenir des langues africaines de même que l’avenir de toutes les langues du monde. Ma bouche sera la bouche des langues qui n’ont point de bouche et ma voix celle de celles qui s’affaissent au fond du cachot du désespoir.

Pensez vous que les Français, parce qu’étant vos enfants de la première génération, devraient automatiquement assurer votre protection ?

Non ! Car on peut être français et gallophobe. Tout comme on peut être afrancophone mais francophile. C’est une question de valeurs, de représentations ou d’imaginaire. Parler une langue c’est accepter d’épouser l’imaginaire de cette langue dans un espace-temps, aussi infime soit-il. J’en appelle donc à toute ma famille répartie aux quatre coins du monde, et surtout en Afrique, à me porter dans leur cœur afin qu’en chœur avec toutes les langues du monde, nous puissions chanter un chant d’amour mutuel et de respect. Il ne s’agit point de me sauver mais de nous sauver, de vous sauver. Désormais unis, vous vivez en moi tout comme je vis en vous.

Mme. L.F… comment pourrait-on vous permettre de retrouver votre dynamisme et votre vigueur d’antan, et partant, de vous empêcher de sombrer dans le néant ?

La solution à mes nos maux réside dans le financement et la promotion du multiculturalisme sous toutes ses formes ; l’avènement d’une poétique de la relation et du divers.

Un dernier mot ?

Oui ! Juste t’indiquer que la grande question philosophique, culturelle et esthétique du XXIème siècle est celle de la mobilité, de la mutualité et de la circulation. Favoriser l’expression et l’expansion de ce triptyque, c’est contribuer à l’avènement d’une Civilisation de l’Universel.

Auteur: NGNAOUSSI ELONGUE Cédric Christian

 

[1] Pour les besoins du récit, certains noms ont été changés. Toute ressemblance, partielle ou réelle avec des référents existant n’est que pure coïncidence.

[2] Mot disparu qui signifie : une mauvais joueur de violon

[3] Un mot ayant disparu du Dictionnaire Larousse.

[4] Mboa signifie Cameroun en dialecte local.

[5] nom masculin utilisé au Cameroun pour désigner une moto-taxi.

[6] verbe utilisé au Tchad comme synonyme de bifurquer.

[7] Mot issu du Camfranglais qui désigne « manger ».

[8] Plat local camerounais fait à base de machoiron et de tomate farcie.

[9] Mot du camfranglais qui désigne « l’action de boire ».

[10] Mot du camfranglais qui désigne le « quartier ».

[11] Mot du camfranglais qui désigne l’action de « dormir »


23 erreurs à éviter lorsque vous postulez à un emploi

Il y a quelques mois, le Réseau International pour la Promotion de l’art oratoire en Afrique, dans les Caraïbes et le Pacifique (RIPAO), lançait un appel à candidature pour le recrutement de trois Research & Communications Fellows. L’appel n’était ouvert qu’aux résidents du Cameroun, principalement ceux de Yaoundé ou Douala. Bien que nous ne recherchions que trois personnes talentueuses et motivées à l’égard du projet Africa Gawlo, nous avons reçu des centaines de candidatures, toutes plus originales les unes ques les autres, mais aussi très surprenantes de par les « erreurs » qu’on y retrouvait.

En tant que membre du comité restreint d’évaluation, j’ai ainsi pu noter au passage quelques manquements récurrents dans la plupart des dossiers de candidatures soumis. C’est pourquoi j’ai constitué une liste de remarques à propos des centaines de dossiers examinés, avec quelques observations générales. J’ai partagé ces remarques avec les participants lors de l’annonce de la première phase des résultats. Pourquoi ? Car je pense que cela pourrait, dans une mesure ou une autre, leur permettre d’améliorer leurs prochaines candidatures et ainsi les rendre plus compétitifs sur le marché de l’emploi. Car une bonne lettre de motivation et un CV sont les premiers éléments à partir desquels on trie des postulants aux offres d’emploi.

PAR RAPPORT AUX LETTRES DE MOTIVATION

Lettre Motivation.

  1. Ne vous contentez pas d’énumérer vos aptitudes ou expériences, mais établissez un rapport pour montrer dans quelles mesures ils vous permettront d’accomplir efficacement les missions qui vous seront confiées. Si la description des tâches a été présentée dans l’offre d’emploi, il faut essayer de les articuler en rapport avec les compétences que vous possédez.
  2. Déclamer ou déclarer ne suffit pas pour convaincre un employeur, il faut démontrer ou prouver. Au lieu de déclarer que vous avez une connaissance de nos programmes, il faut le démontrer. Évoquer astucieusement l’un des programmes en rapport avec vos compétences ou centres d’intérêt est une bonne solution.
  3. Prenez la peine de bien lire et comprendre l’offre avant de postuler: dans les dossier que j’ai étudié, certains ont mentionné être résident à Bamenda alors que l’appel à candidature spécifie clairement qu’il faut être résident de Douala ou Yaoundé.
  4. Évitez les erreurs de grammaire ou de conjugaison. C’est très désagréable à lire et laisse une mauvaise impression sur votre dossier. Assurez-vous que le contenu de votre mail par exemple ne contienne aucune faute. Rédigez, et au besoin, faites-vous relire avant d’envoyer votre courriel de candidature.
  5. Utilisez un langage simple et compréhensible. Evitez de vous répéter ou de vous perdre dans vos phrases en essayant d’employer le « Gros français » car il ne s’agit point d’une lettre romantique ou d’un concours littéraire…
  6. Votre lettre de motivation ne s’écrit pas dans le mail: Cela doit être rédigé séparément et attaché au mail que vous envoyez. Pourquoi ? Parce qu’on télécharge et enregistre toutes les Pièces Jointes envoyées pour les traiter par la suite. Si votre LM est plutôt écrite dans le mail, elle peut, accidentellement, ne pas être remarquée ou lue. Et on pensera que vous n’avez pas fourni cette pièce.

PAR RAPPORT AUX CV

Curriculum Vitae. CC
Curriculum Vitae. CC

7. Intégrez des photos « professionnelles », c’est-à-dire claires et bien cadrées, où on voit clairement votre visage. Pas de photo fantaisiste – où on voit deux ou plusieurs personnes, avec des chapeaux et des lunettes fumées… – ou avec des mimiques inutiles (selfie). Si vous n’en avez pas de pro, ne mettez rien. C’est mieux ! L’habit ne fait pas le moine mais on reconnait un moine par son habit…

8. Présentez l’expérience professionnelle et le parcours académique dans un ordre antichronologique, c’est-à-dire du plus récent au plus ancien.

9. Décrivez toujours vos plus importantes réalisations dans votre expérience professionnelle. Cela permet d’avoir un aperçu plus clair de l’étendue de vos compétences. Moi, je le fais sous forme de tiret avec des chiffres ou mots clés.

10. Ne mentionnez que les expériences et compétences qui sont pertinentes (ou connexes) pour le poste visé : ne fatiguez pas votre futur employeur avec des éléments n’ayant rien à voir avec ce qu’il recherche. Personnellement, je pense qu’un bon CV peut tenir en 1 ou 2 pages max. Si vous en avez plus, essayez de le synthétiser ou de l’adapter au profil recherché par l’employeur.

OBSERVATIONS GENERALES

11. N’envoyez pas deux dossiers de candidatures:  Vous pouvez être écarté car c’est un signe d’impréparation et de désordre. Si vous constatez que vous avez oublié certains éléments fondamentaux du dossier, écrivez d’abord pour savoir si vous pouvez rajouter un élément supplémentaire. Et c’est après confirmation que vous envoyez l’élément requis. Parfois, les candidatures sont stockées progressivement, du plus ancien au plus récent. C’est irritant de trouver un dossier de candidature qu’on a déjà enregistré dans la base de donnée.

12. Monsieur en français s’écrit M. Mais en anglais c’est Mr.

13. Respectez TOUJOURS les instructions !

  1. Si les pièces requises sont 3 : CV, LM et Quitus, vous devez absolument les envoyer ou justifier pourquoi l’une des pièces manque. Les dossiers incomplets sont (parfois) automatiquement rejetés sans consultation.
  2. Si on vous précise un objet spécifique, respectez-le. Cela permet souvent d’envoyer des réponses automatiques aux mails entrant qui ont cet objet-là. Le nôtre était : [Candidature RIPAO Fellowship 2017] mais certains ont envoyé : [Mon CV], [CV et LM], [Candidature], [Demande d’emploi], [Candidature commerciale], [Jobs seeking]… Quand vous ne le faites pas, vous donnez plus de travail à l’équipe de recrutement car elle doit vous envoyer un mail personnellement pour vous confirmer la réception de votre dossier. Alors qu’en respectant les consignes de l’entête, vous deviez le recevoir automatiquement. Cet aspect peut susciter le rejet de votre candidature car cela traduit que vous n’êtes pas discipliné ou attentif aux détails pour lire suffisamment les consignes et les appliquer.
  3. Respectez le nombre de pièces exigées pour la candidature. N’envoyez pas des éléments non requis. Ce n’est pas le moment d’étaler tout votre background professionnel ou académique. Cela peut être mal interprété et se retourner contre vous. Certains ont envoyé leur relevé de salaire antérieur : c’est risqué parce que vous donnez ainsi à l’employeur la possibilité d’évaluer subjectivement le salaire qu’il prévoyait vous offrir. Par exemple, si vous avez prévu payer 1000 FCFA le mois a un employé qui vous montre un relevé de salaire où il gagne 7000 FCFA le mois avec un autre employeur, je pense qu’il y’a de fortes chances que vous réfléchissiez à deux fois avant de le retenir, même si son profil cadre avec votre poste. Par contre, si vous prévoyez lui accorder 7000 FCFA/Mois alors que son relevé indique qu’il ne gagnait que 2000 FCFA/Mois, vous allez surement vouloir réduire l’offre de salaire que vous prévoyiez de lui donner. Il est donc préférable de ne point révélez ces aspects sensibles à votre potentiel futur employeur si cela n’est point explicitement demandé.

14. Je ne vous conseille pas de déposer un dossier de candidature par mail sans y ajouter quelques lignes de salutations, par simple politesse. Certains nous ont envoyé leur dossier sans même dire « Bonjour » ou « Bonsoir », mais juste avec les pièces jointes requises.

15. Si possible, envoyez votre candidature d’un ordinateur. Le fait de voir : « Envoyé depuis Yahoo Mail pour Android» ou « Télécharger Outlook pour Android » peut laisser penser que vous n’avez vraiment pas pris le temps de composer votre dossier avant de l’envoyer. Certains pourront ne pas être d’accord, mais c’est mon avis.

16. N’envoyez jamais un document sous format RTF: Le format RTF n’a presqu’aucune aucune mise en forme visible et n’apporte aucune esthétique à votre CV ou LM. Word est acceptable mais le format PDF est le meilleur car cela conserve la mise en forme initiale de votre document. Dans l’idéal, privilégiez le PDF.

17. Dans la mesure du possible, faites tout pour envoyer la candidature à partir de votre propre boîte mail et non celle de votre ami ou frère.

18. Nommez bien les fichiers de votre candidature: cela facilite l’identification et vous donne un air professionnel. Imaginez-vous recevoir un fichier qui porte le nom [WhatsApp Image 2017-09-18 at 11.14.57.jpeg] ou [CV]… Cela est complètement anonyme et ne renvoie à rien ou personne. Vous pouvez adopter le modèle : [Nom du fichier-Votre Nom]. Imaginez votre CV se retrouve dans un autre dossier par erreur, sans l’avoir clairement identifié, il est plus difficile de le ranger ou de l’archiver.

19. Assurez vous que la dernière version de vos fichiers sont « corrects » et s’ouvrent normalement avant de les envoyer. Certaines LM ou CV ne s’ouvraient tout simplement pas. Et vous n’allez jamais voir un recruteur vous envoyer un mail vous demandant de lui renvoyer la bonne version de votre CV ou LM. (lol)

20. Etre précis et concis dans vos demandes de renseignements : [Bonjour monsieur. S’il-vous-plaît. J’aimerais avoir plus d’amples informations concernant l’offre.] L’expéditeur ne précise aucunement l’élément sur lequel il aimerait avoir des compléments d’informations. Lui répondre est plus difficile.

21. Évitez de mettre [Candidature spontanée] en objet lorsque ce n’est pas le cas. On envoie une candidature spontanée lorsqu’on veut postuler à un emploi sans que l’entreprise n’ait clairement diffusé d’appel à recrutement. Mais si c’est le cas, comme avec le RIPAO, prière d’utiliser l’objet qui vous a été suggéré.

22Maintenez le même code linguistique dans le CV et la LM. N’écrivez pas l’un en Français et l’autre en Anglais. Même si vous êtes parfaitement bilingue…

23. Priez ! C’est sans doute le conseil le plus important. La prière doit accompagner toutes nos actions car peu importe ce qu’on fait, c’est le Créateur qui a son mot final. Une petite prière avant d’envoyer votre dossier peut faire des miracles (si vous avez le profil évidemment !).

Voilà donc les 23 petits conseils que j’ai voulu partagé avec vous. J’espère qu’ils pourront être utiles à certains ou inciter d’autres à partager sous forme de commentaires, les pratiques qu’ils adoptent en postulant à une offre d’emploi. Je me doute évidemment que mes remarques peuvent ne pas être partagées par tous, ce n’est que logique. Vous êtes le/la bienvenu(e) si vous souhaitez complétez avec des éléments de votre expérience ! A+